Star Wars The Force Awakens

Tout fan consciencieux de Star Wars a vécu le rachat de la licence par Disney, la fin de l’Univers Étendu et l’annonce d’une nouvelle trilogie avec des sentiments contradictoires et une anticipation craintive, mais il y a bien une chose que l’on avait tous envie de vivre : c’est de revoir ce titre emblématique apparaître sur un écran de cinéma au son des notes éternelles de John Williams et se laisser porter par de nouvelles aventures dans notre galaxie.

Soyons tout de suite clair, ce film a été fait pour plaire au plus grand nombre et battre les records qu’on lui connaît aujourd’hui.

Fan de la première heure, aficionado, nouveau spectateur, amateur de grand spectacle, enfant de tout âge, le cahier des charges est rempli en terme d’action et d’effets visuels, de messages pertinents transmis, d’éléments d’intrigue pour une suite. Ce qui aurait été largement suffisant si on parlait d’un blockbuster ‘stand alone’ pour une toute autre licence ou le départ d’une nouvelle.

En l’occurrence, on parle d’un Star Wars.

Bien que la réalisation d’Abrams, la musique de Williams soient proches de l’irréprochable, on est très loin d’avoir un travail de qualité en terme d’originalité de scénario et de narration, de développement de personnage, de cohérence et profondeur.

Il y a bien sûr des bémols à apporter à cette dernière remarque. Le traitement des nouveaux personnages principaux est suffisamment travaillé pour les rendre viables et attachants. Les acteurs tiennent leurs rôles avec brio, Finn (John Boyega) incarne à merveille le relâchement de tension et l’instinct de préservation, Rey (Daisy Ridley) s’impose comme l’héroïne forte et indépendante et Kylo Ren (Adam Driver) symbolise l’instabilité d’un enfant perdu et capricieux. En terme d’introduction à une nouvelle trilogie, ces éléments s’avèrent rafraîchissants pour le grand public, surtout quand suppléés par un symbolisme visuel évocateur.

Aborder la capacité au libre arbitre des Stormtroopers, la place faîte à une identité féminine réaliste ainsi que la lutte intrinsèque pour résister à la lumière sont autant de messages bien conçus et bien transmis. Et bien que Lucasfilm ait annoncé depuis longtemps certaines de ses intentions d’écriture, c’est relativement agréable de la part d’un film désormais estampillé Disney de proposer un axe de sensibilisation novateur par rapport à bon nombre de leurs productions.

Et puisqu’on en parle, le rôle de Disney ne s’arrête pas là.

Là où Georges Lucas avait cette capacité à nous offrir une réalisation bancale accompagnée d’une intrigue politique de fond particulièrement tangible et cohérente, ce film manque terriblement de sa présence narrative. Il avait bien proposé ses idées pour cette nouvelle trilogie, mais il a rapidement été remercié…

Dés la première scène, certains personnages et relations sont montrés sans être explicités, présentés et ce défaut perdure tout au long du film. Il manque cruellement de contexte.
Le personnage de Poe Dameron (Oscar Isaac) est parmi les premiers que l’on voit à l’écran et ne sert au final que de bouche trou introductif, à amuser la galerie de son pilotage et ne sera sûrement plus développé que dans le prochain. Il en va de même pour le Captain Phasma (Gwendoline Christie) qui du haut de son charisme et de son titre d’« Actrice de Game Of Thrones » est inexistante tout au long du film.

Pour un personnage comme le Leader Suprême Snoke (Andy Serkis), ça s’inscrit dans une certaine logique de ne pas nous présenter sa biographie tout de suite, mais il y a clairement un vide créatif quelque part…

Le texte déroulant introduisant ordinairement le contexte des héros et de la galaxie ne s’attarde que sur la quête pour retrouver Luke Skywalker (Mark Hamill) en posant les bases d’un conflit, étrangement familier, impliquant la République, la Résistance et le Premier Ordre. Rien que là, beaucoup ont vu pleins de questions surgir dans leur esprit quant à l’existence d’une Résistance et d’une République en même temps…

Cette absence énorme pour un film de cet acabit est dû au fait que Disney, dans sa grande stratégie marketing, souhaite inciter le spectateur et son portefeuille à se procurer les différents médias de « l’univers officiel » afin de compléter l’intrigue du film. Sans commentaire.
En plus de ce manque de contexte cohérent, il y a une volonté clairement assumée de coller à grands renforts de clins d’œil (trop nombreux pour être énumérés) à la trilogie originelle et de faire oublier la prélogie. Ce qui a pour conséquence directe de créer une sensation de répétition, source de lourdeur, en plus de recourir à des clichés et ressorts scénaristiques déjà vu partout ailleurs.
Sans oublier une volonté de susciter de l’émotion forte à travers certaines scènes qui s’avèrent complètement bancales, pour ne pas dire ratées. Finalement, le personnage du droïde BB-8 est un vecteur bien plus démonstatif d’émotions que beaucoup d’autre scènes du film.

Comme l’ont qualifié le Fossoyeur de Films et Axolot, beaucoup de ces clins d’œil sont tellement appuyés qu’ils font office de lieux, de personnages de service, remplissant un rôle préconçu plutôt qu’inédit. Et certains autres, ajoutés par le réalisateur arrive comme un cheveu sur la soupe sans qu’ils apportent quoique ce soit au film ou à son déroulement.
La présence des anciens acteurs et du Faucon Millenium est forcément agréable, mais sont au final les seuls à nous apporter une quelconque explication quant aux trente années qui se sont écoulés dans la galaxie. Y a rien de mal à faire du neuf avec du vieux, mais encore faut il le faire intelligemment…

En conclusion, on a un film bancal qui peine à trouver son identité et qui, bien qu’il soit agréable à regarder, déçoit tant il travaille d’arrache-pied à être quelque chose qu’il n’est pas. Autant les efforts de réalisation visuelle, de rythme et d’ambiance avec le recours à des effets pratiques sont louables, autant l’histoire ne présente que peu d’ambitions – étant cousue de fil blanc – et aucune originalité tant elle veut reprendre ce qui a déjà été fait.
On s’en souviendra comme d’un moment où notre âme d’enfant a vibrée au premier visionnage avant de revenir lors du suivant à la dure réalité des blockbusters actuels où la sensation prévaut sur la substance et à une trop grande tendance à emprunter au format de la série télévisée.
L’univers Star Wars est là, le rêve aussi mais manque à l’appel la touche de son créateur et la profondeur de son univers. Beaucoup s’accordent déjà à dire que le premier opus de la prélogie a plus de légitimité que The Force Awakens tant ses auteurs sont passés à coté de ce qu’il aurait pu (dü?) accomplir : Apporter une réelle nouveauté.

Critique qui aurait pu être littéralement dix fois plus longue.

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