Rogue One – A Star Wars Story

Avant d’entamer cette tradition désormais annuelle, il va être important de contextualiser notre propos afin de bien aborder ce qui fait que ce film est ce qu’il est.

Dans un premier temps, est ce que vous savez ce qu’est Rogue One ?
Parce qu’étant donné le nombre de personnes ayant pu se poser la question ces dernières semaines associé à une communication timide de la part de Dinsey/Lucasfilm, l’interrogation est légitime.

Rogue One raconte l’histoire de l’obtention des plans de la première Étoile de la Mort par la Rébellion, juste avant la trilogie originale commençant par un Nouvel Espoir (IV).

Oui, ça va spoiler en toute légitimité pour des raisons évidentes.

Le rôle de ce film est donc de combler un vide de narration dans les dix-neuf ans séparant les deux trilogies (I II II – Rogue One – IV V VI).
Il est à noter que ce « vide » avait déjà été comblé et conté maintes fois dans l’ancien Univers Étendu, Disney continuant d’essayer de faire « du neuf sans le bon vieux ».

Également, certains sujets seront volontairement laissés de côté, tenants en effet plus de la sensibilité de chacun. Par exemple, l’absence de texte déroulant au début du film ou l’utilisation de personnages en CGI sont des partis pris tout à fait viables pour un film se voulant lien entre ceux existants. Ou pas du tout, c’est chacun qui le voit.

Cependant, quand on ne parvient pas à assurer une promotion suffisamment claire pour que le spectateur non-initié puisse s’y retrouver, c’est déjà se tirer un p’tit coup de blaster dans le pied. Notamment avec des bandes annonces très loin du produit fini et des tournages supplémentaires.
Dans le même temps, un premier spin-off sur cet univers est un gros risque, particulièrement après les échecs de contextualisation du Réveil de la Force. Et forcément, quand on est Disney, on peut budgétiser un tel film mais pas tout miser dessus.

Et à juste titre, l’entreprise ayant très bien compris, à notre grand désarroi, qu’à partir du moment où quelque chose remplissant un certain cahier des charges est estampillé Star Wars, les gens, fans ou non, mordront à l’hameçon. On reste loin des records d’entrées du précédent film, mais Rogue One se rentabilisera de lui même très rapidement à n’en pas douter. Il semble donc temps d’annoncer qu’en ce qui concerne les œuvres les plus prisées par le public, dans son sens le plus large, cette licence entre dans une ère de médiocrité standardisée doublée d’un penchant commercial à son apogée.

Ah oui, ça donne des coups de Teräs Käsi d’entrée de jeu.

Parce qu’au bout d’un moment, qu’on soit un fan de l’univers ou de cinéma, que le film soit qualitatif ou branlant, faut enlever les gants pour se retirer les étoiles des yeux et parler vrai.
Rogue One, par l’intermédiaire de Gareth Edwards et ses équipes, se donne les clés pour être un bon film Star Wars, un bon film de guerre, mais n’est pas en soi un film qui restera dans l’histoire.

Et cela pour une raison très simple, à vouloir créer des personnages et toute une intrigue avec comme seule intention de lier le film à sa suite directe, on se retrouve avec un film très bancal sur ses héros.
Un soin tout particulier a été apporté à mettre en avant l’univers avec une intention de respect et de continuité palpable. Comme l’est d’ailleurs la passion du réalisateur à travers son implication dans ce film.
Comme pour son prédécesseur, l’imagerie participe d’ailleurs grandement à cet ancrage, le travail effectué sur la photographie et l’association des factions à des notions d’échelle ne sont pas sans rappeler le film Monsters qui avait fait connaître Edwards au grand public. Comme son prédécesseur, l’utilisation d’effets pratiques et de clins d’œils est très accentuée, mais avec un degré supplémentaire de justesse et d’innovation.

L’un des autres problèmes inhérent au fait de créer une nouvelle histoire, c’est qu’on prends un temps fou à introduire de nouveaux lieux, personnages et à essayer de leur donner teneur et cohérence par rapport au film et son univers. La première partie de Rogue One consiste donc à constituer l’équipe de Rebelles et poser les enjeux des Impériaux. Et il n’est pas évident de créer quoique ce soit de concret et attachant autour d’autant de héros en deux heures de films. Au final, c’est, encore une fois, bel et bien K-2SO le robot qui est le mieux écrit et le plus attachant. Well, les personnages Impériaux sont plus attachants que les héros !

Beaucoup de points de controverse sont justifiables par rapport à l’univers, mais là encore, un certain classicisme Hollywoodien contribue à ne pas rester aussi naïf. On nous vend le film avec une héroïne « forte et indépendante » et c’est le second couteau récemment repenti qui ne lui laisse même pas la chance de se battre par elle même à la fin du film. On nous fais baver avec des grands noms au casting qui ne sont que des faire valoir jetables. On nous présente deux guerriers avec qui le maître du jeu est tout de même vraiment sympa sur les lancés de dés.

 »Oui mais la Force ! » Pardon mais Bantha Poodoo la Force…

Tout ça pour dire qu’autant que le divertissement offert par le film puisse être plaisant, les archétypes et deus-ex machina desservent les tentatives d’implanter de la réflexion, de l’émotionnel, du contexte cohérent. Alors que c’est bien pour ces deux aspects que beaucoup d’entre nous vont voir un Star Wars.

Une scène réussie pourtant parfaitement le pari de créer du liant tout en ancrant ses personnages, c’est celle du rêve de Jyn nous faisant deviner Coruscant. Rien que ça suffit à se dire que s’inspirer plus du travail de Lucas aurait pu faire aboutir à un film bien plus cohérent et captivant. Il est plaisant de voir la prélogie être incluse, mais sa richesse est très loin d’être exploitée ici.
Cette scène contribue d’ailleurs à renforcer le ton de noirceur assumé très rapidement, parce qu’il fallait bien que ce ne soit pas un film pour enfants étant donné ce qui y est abordé. Et ça, ça fait du bien et c’est ce qui en fait un bon film de guerre Star Wars.
On n’a pas affaire à une Rébellion simplement gentille mais à une résistance en guerre pour sa survie, à un Empire imposant et à un final aussi impitoyable qu’un film Disney le permet.
Cette noirceur renvoie quelque part à celle de L’Empire Contre-Attaque à peine égayée par la finalité de Rogue One menant vers un Nouvel Espoir tout apportant une continuité à ces personnages récurrents. C’est là que tient le respect envers l’univers original. Mais c’est qu’ce film s’avère tout de même être ce qu’il est supposé être : un complément cohérent à la trilogie !

Au final, et ceci risque de choquer après tant de critiques, le film fonctionne globalement bien et sera revu et acheté. Il tient la route malgré ces nombreux défauts. On n’a que peu de temps pour s’ennuyer, l’action est impressionnante, l’imagerie travaillée, les piliers tiennent leurs rôles, les interactions entre le casting principal fonctionnent sans pour autant parvenir à n’être autre chose que du remplissage jusqu’au final en chair à canon. Et avec certains choix et scènes, l’attente de beaucoup a été comblée. On ne saura sûrement jamais si ses tournages supplémentaires ont contribués à rendre le film plus ou moins noir, mais le résultat aura suffi à faire rêver beaucoup d’entre nous. Il est simplement déplorable que les sensations faciles prévalent sur le contenu et l’ampleur de l’intrigue.
Ce n’est certainement pas le meilleur Star Wars, mais Rogue One s’inscrit proprement dans le tout que forme la prélogie et la trilogie originale.

Ah oui, la nouvelle, on verra à la fin !

Et afin de rendre hommage au départ inattendu de Carrie « Leia Organa Solo » Fisher, je vous renvoie à cette vidéo réalisée durant un week end de Juillet où j’ai eu l’occasion de la voir, de loin, interagir et s’immortaliser avec autant de fans qu’il a de diversité dans l’être humain. Et c’était beau et suffisant.

The Faces of The Force